MAQUILLEUSE ? ESTHÉTICIENNE Alors ? ....... Je suis rentrée en France.
La véritable galère a commencé et pour survivre je me tiens là, en pharmacie. Je fais mes preuves pour une nouvelle maison de cosmétique, en attendant de signer un CDI pour me loger et récupérer ma fille.
Je pense aux belles jambes de ma mère quand je me collais à elle, étant petite. Elles étaient douces, blanches, si belles sous le soleil brillant de ma ville natale. Elles se terminaient toujours sur une belle paire d'escarpins noirs ou sur de beaux ongles vernis, dans des sandales hautes. Et je les suivais, du haut de ma petite taille pour apprendre à marcher. Ses espérances pour moi ne devaient pas être celles-ci. Je le sais depuis que j'ai mon enfant. L'ingratitude ça s'apprend vite. Alors, comment ne pas garder de rancoeur, de rage au fond de soi.
La porte qui s'ouvre, le froid, faut continuer de marcher, faut continuer à poser les pieds dans les pas du destin et l'imaginer lumineux, fort, chaud comme un orbe solaire sur le présent détruit. Faut avoir le courage de ces fleurs dans les jardins abandonnés de Beyrouth, pour germer à travers la poussière, le béton et les ruines afin de diffuser, à nouveau, ce parfum de mage qu'est la vie.
Et je le sens au fond de moi ce parfum qui se cache aux replis des larmes, parce que pour guérir, faut d'abord commencer à pleurer, à laisser fondre cet objet non identifié qui plie le souffle, le retient à l'arrière de gorges nouées de désespoir.
Et oui. Plus familier encore, est aujourd'hui pour moi ce cri de Francis Bacon, comme une ponctuation sur les différentes arènes que la vie aura déployées sous mes pas.
Arènes intensives où je puise la force de continuer le combat.
Lydie Canga. Beyrouth. Janvier 2000.